Deadly Game : L'éveil des morts

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27-09-2013 à 21:02:36
L’homme a disparu. L’homme est mort. La scène n’était pas assez cruelle pour appartenir à Deadly Game. Il ne manquait qu’eux. Il fallait qu’ils se pointent. Il fallait que les zombies se pointent. Ils arrivent en masse, des dizaines de corps déchirés agitent leurs membres lentement. Rivka nous a toujours dit : « Même dans les pires situations, il y a toujours un côté positif ». Aujourd’hui même si tout semble noir, je trouve une lumière. Le pédophile s’est fait manger avant nous. A croire qu’à Deadly Game, on peut y trouver une mince justice. L’eau du lac tire à présent vers le rouge bordeaux sang. C’est ma couleur préférée. Elle me rappelle la robe de Nelly, la petite poupée que j’ai sculptée à ma sœur pour ses sept ans. Miranda. Ma petite sœur. Où es-tu ?
« Mais Maddie, tu divagues ? Miranda n’est pas là. Mais lève-toi ! Tu as lutté toutes ces quatorze années pour ça ? Finir ta vie bouffée par un stupide jeu de la société ? »
Je me redresse aussitôt. Nadejda m’aide à courir. Elle pleure. Je l’envie. Je ne peux plus pleurer. Je n’ai plus de larmes. J’ai épuisé tout le bocal. Je me laisse guider, les yeux mi-clos. Soudain je freine. Je hurle. Un troupeau de zombies s’avancent droit vers nous. Nadejda, que fais-tu ? Reviens ! Elle se cogne à la horde. Elle a décidé de se suicider la pauvre petite. J’assiste à la scène. Immobile.
« Mais va l’aider Maddie ! Va l’aider avant qu’ils ne t’attrapent à ton tour ! »
Je sursaute. Trop tard. Une main m’agrippe l’épaule. Des zombies. Ils m’encerclent. Ils grognent, ils meuglent. C’est la première fois que j’en vois. Que c’est laid ! C’est un visage troué, déchiré, décomposé, qui nous donne cette étrange envie de dégueuler notre petit déj’. Ils ont des mains, fripées et dégueulasses qu’ils s’amusent à planter un peu partout dans ma chair. Ils m’entraînent, ils me tirent vers le lac. Je me demande si les zombies peuvent éprouver des sentiments mais, pour l'heure, ils n'ont aucune pitié. Au revoir Miranda. Au revoir Rivka. Au revoir Nadejda. Je perçois l’odeur de charogne : l'odeur de la mort. L'odeur de la fin d'une vie.

« Bon Maddie.... BOUGE TOI Maintenant il va falloir commencer à apprendre à s'défendre hein ! C'est pas tout... mais.... là, tu ressembles plus à un cadavre qu'à une petite fille » C'est la voix qui revient, elle se pointe dès je suis épuisée ou en colère.
« Compte les zombies autour de toi. »
6 bras m'agrippent. 3 paires de mains. 3 zombies.
« Bien. On avance. Maintenant élimine les uns par uns. »
Je voudrais bien ! Mais comment ?
« Dans la poche de ton pantalon. »
Avant qu'on me drogue pour Deadly Game, je sculptais dans ma chambre du bois, j'avais laissé le couteau dans ma poche. Une chance que le pédophile ne m'ait pas déshabillée entièrement et que Deagly Game n'est pas vérifié le contenu de mon pantalon. Ma main gauche se trouvant libre, je fouille. Le couteau est bien là.
« Crève leurs les yeux »

J'ai mal, je souffre, ma chair saigne, ma chair se meurt un peu plus chaque minute. Et moi, comme une débile, je fais ce que j'ai toujours su faire : souffrir en silence.
« Crève leurs les yeux j'ai dit »
Le manche du couteau est bien planté dans la paume de ma main gauche. Les zombies m'ont détruit mon épaule droite ainsi que mon avant-bras mais, je peux encore bouger. Je me mets à tourner très vite sur moi-même, je ne cesse de tourbillonner. Je me débarrasse peu à peu des zombies pour qui je suis maintenant trop rapide à attraper. Je dois ressembler à une malade mentale retransmise à la télévision, à moitié nue, et les membres décomposés. Je m'arrête et couteau bien serré, je donne des coups dans le cerveau du premier zombie. Un autre arrive par derrière. Je virevolte. Je lui broie la mâchoire, gantant mes mains de sang, et, je lui offre un biface en pleine gueule. Il bouge encore ce con, toujours debout. Je sens des griffes attaquaient mes épaules, les autres reviennent à la charge. Je parsème sa tête d'entailles profondes.
« Un de moins c'est déjà ça. »
Je reste sur place. Qu’ai-je fait ? Je suis devenue un monstre. La société m’a transformée et je me suis laissé faire.
« Maddie. Tu as tué un zombie qui n’avait pas de cœurs ni de famille. Maddie, le zombie ne va manquer à personne, personne ne le regrettera. Par contre toi, si tu t’en vas… Miranda et Rivka auraient voulu que tu te battes jusqu’à la dernière minute. Et Nadejda. Tu ne vas pas la laisser crever, hein, dis. »
Les zombies me rongent la peau, ça me tue. J’envoie des coups par ci et par-là qui ne les atteignent pas qui ne servent à rien. Par chance un zombie approche son visage un peu trop près de moi, j’en profite pour enfoncer ma lame dans ses deux yeux. Je les lui ai crevés.
« Manque plus qu’un . »
Le dernier est entre mes jambes, il me mord les chevilles. Je joigne mes jambes, je sers au maximum cette tête jusqu’à ce qu’elle éclate. Je ferme les yeux, je me bouche les oreilles.
« C’est bon il est mort. »
Deux zombies par terre, un aveugle qui a arrêté de me coller. Il se dirige vers un petit point noir. Nadejda ! Je cours, le zombie me suit. Je lui lance le couteau en plein front. Je crois qu’il est mort. Je me précipite sur elle. On voit un petit bout de son cerveau. Elle saigne des bras. Ses yeux demeurent clos. Une petite poupée meurtri je vous dis.
« Nadejda » je lui susurre à l’oreille.
Je crains le pire. Mon cœur bat la chamade, des perles de sueurs apparaissent sur mon front. Où sont passés les dizaines de zombies ? Ils ne seraient pas partis si elle était encore vivante. Nadejda serait… morte ? Non, non je ne veux pas le croire. Je la secoue par les épaules.
« Nadejda ! » je hurle. Je ne veux pas le croire. Non pas ça. Soudain, elle ouvre doucement les yeux. Je lui souris. Je la sers dans les bras. Un poids énorme s’enlève de mon cœur.
Elle me regarde de travers, je ne dois pas être reconnaissable après le passage des zombies. Je l’aide à se lever.
« Nam nado ukhodit' byistro » je lui dis en jetant un regard aux alentours du parc.
Je sens que quelque chose ne va pas. Elle me regarde comme une inconnue. M’aurait-elle oubliée ?
Elle me tourne le dos. Je ne la reconnais plus. Je lui touche l’épaule.
« Nadejda ! »
Elle se met à galoper dans la direction opposée. Elle m’évite.
« Ne ukhodi! Vernis'! Yesli vy khotite ostavit' menya , khorosho ..., no vy ne dolzhny idti seychas! »
Elle est tombée par terre, elle n’a plus de force ! Si Nadejda est vivante, et que les zombies sont partis, comment a-t- elle put faire pour sauver sa peau ? Je doute que Nadejda est combattue tous ces zombies à main nues. Quelqu’un l’aurait-il aidé ? Je lui demanderai plus tard ce qui s’est vraiment passé… et quand elle voudra bien m’approcher.
Je m’agenouille près d’elle. Près de ce petit corps affaiblis. Elle a perdu beaucoup de sang. Je comprends qu’elle ne se souvienne plus de moi. Les zombies lui ont sans doute enlevé un truc dans la tête qu’ils n’auraient pas dû.
« Nadejda. C’est moi, la fille qui est venue te chercher quand tu étais dans l’arbre. Je t’avais pris pour ma petite sœur, tu te souviens ? Tu cherchais ta sœur toi aussi…»
Elle a les yeux grands ouverts, sa respiration est bruyante et elle me sert la main.
« Tu sais j’ai oublié de me présenter. » Je soupire, puis, je rajoute. « J’ai oublié de te dire mon nom »
J’organise ses mèches et je constate l’ampleur des dégâts causés par les zombies. Je grimace. Elle remue ses lèvres, elle essaie de parler, seulement, elle n’a quasi plus d’énergie et c’est une mince brise qui sort de sa bouche sèche. Je continue la conversation commencée :
« Je m’appelle Maddie. »
Maddie. Le prénom résonne dans ma tête. C’était le prénom de ma mère aussi, la seule étrangère de la famille, elle était anglaise. C’est le seul souvenir qui me reste d’elle. Je glisse mes mains sous son dos, je la soulève. Elle me palpe le cou et s’y accroche. Je crois qu’elle m’a reconnue. Le parc est vide. Je marche péniblement à l’opposé du lac et des zombies morts, mon épaule droite est déboîtée, je ne resterai pas longtemps en vie. Je me mords les lèvres, je me retiens de crier : je pourrais attirer les zombies. Je jette un coup d’œil à Nadejda, elle semble préoccupée, je devine que dans sa tête, tout doit être perturbé. Nous arrivons à une aire de jeu, le sol est goudronné, quelques jeux ont été disposés : un tourniquet, un toboggan, une balançoire…. Une balançoire. Je m’arrête. Il y a quelqu’un sur la balançoire, il ne se balance pas. Non. De toute manière il ne peut pas. Il s’est pendu. Mon cœur se resserre. Il n’en pouvait plus le pauvre, il s’est suicidé. Je compte faire de même. Quand j’aurais retrouvé la sœur de Nadejda ou quand je serais persuadée qu’elle sera entre de bonnes mains. Je pose Nadedja sur l’autre balançoire, ses mains se tiennent aux chaines en fer. J’analyse le cadavre, c’est un gabarit de 20 ans je dirais, des épaules larges, bien proportionné, bien musclé. Il aurait pu survivre aux Deadly games sans problèmes, mais des fois, le physique ne suffit pas. Je lui enlève son tee shirt révélant un corps athlétique. Nadejda est à côté de moi elle touche le cadavre. Des larmes roulent sur ses joues. Ah ces cons, ils payeront je vous dis ! Mon cœur se comprime, je pense à la mère assise devant la télé assistant au suicide de son fils. J’en peux plus, mes membres sont tétanisés par la peur, par le froid, par la fatigue. J’arrache les manches du vêtement et je fais passer la tête de Nadejda dans le trou des manches. Cela lui fait un bandeau pour sa blessure. Elle me sert la taille très fort. Je crois que c’est une façon de me remercier. J’enfile le reste du tee shirt, il est plein de sueurs, c’est une désagréable sensation mais je sers les dents. Je remarque que le cadavre tient quelque chose dans sa main. Un papier.
Je lis. Il ne manquait plus que ça. Hors de questions d’emmener Nadejda avec moi. De la part de DeadlyGame, une mission se complique toujours plus, une fois sur les lieux.
« Reste là Nadejda, je reviens, j’en ai pour pas longtemps." Elle fronce les sourcils.
"Trop dangereux, je vais te laisser dans un arbre, au moins personne ne pourra te faire de mal et tu en profiteras pour te reposer. »
Elle n’a pas le temps de répondre, je lui empoigne la taille, la monte sur mes épaules la dépose sur le premier arbre que j’aperçois. Je lui tourne les talons, faisant semblant de ne pas entendre ses gémissements. Maintenant à nous deux bracelet en or. Un grand portail rouillé s’oppose à moi. C’est ici. Silence complet. J’attends un mètre derrière les grilles. Une main surgit entre les barreaux, le bracelet brille. Le zombie agite sa main mais il ne peut m’atteindre. Je souris. Un peu trop vite. Je ressens une énorme douleur à ma main droite. On me brûle, on me ronge la main. Je l'agite mais cela ne fait rien. Je constate qu’elle est habillée d’une croix noire. Le zombie saboule les barres en métal. Une seule solution : m’enlever le bout de peau où est tatouée la croix par le zombie. Je laisse donc ma main à sa portée et je me la laisse déchiqueter. Je ferme les yeux, le zombie n’y va pas gentiment. Je ne sens plus ma main, le zombie m’a bien aidée, la croix tatouée est partie. Ses griffes sont tellement enfoncées dans ma peau qu’en ramenant ma main vers moi, j’emporte la sienne et la détache de son bras. Je prends le bracelet en or de sa main pour le glisser à mon poignet. Je crache sur ma main droite et je la masse avec ma salive. Dégueulasse je vous le confirme. Un petit rire nerveux m’échappe : je n’ai jamais autant souffert. La main plus ou moins apaisée je m’en vais rejoindre Nadejda. Je la trouve assoupie, je la laisse dormir. Demain, quand elle sera bien en forme et que nous aurons mangé, je lui demanderai comment elle a fait fuir les zombies et puis, nous irons trouver sa sœur.
06-10-2013 à 22:59:49
Tu refuses de comprendre. D'y penser. Mais comment faire semblant de ne pas savoir ? Tu as tout entendu. Tu as souffert pour lui.
Cet être immonde aussi t'as vomis ses sensations au visage, cet ogre en déréliction a recraché tous ses anciens repas sur ton âme écharpée par la brutalité du monde ; il t'as fais avaler sa peur propre et sa souffrance dédiée, transformé l'arc-en-ciel fragmenté par ses soins, diaprures laissées à l'abandon contre les murs de l'effroi, en pandémonium liquide de sang fouetté, de sang libre au dehors des veines éclatées- de larmes chaudes, rapides, qui font du bruit dans ton souffle. Tu as suivis avec ton propre corps tous les tourments du sien ; car tu ne peux faire autrement Basile, car tu es le prisme qui capte toutes les lumières, même les lumières sales, les lumières jaunes et faibles des bars miteux où devaient ramper les malheurs crachés en imprécations spiritueuses du monstre assassiné. Cet homme ne t'as pas violé. Non. La femme de glace et de neige ne lui en a pas laissé le temps, mais il t'as malgré tout atteint, sans jamais pénétrer ton corps mis à mal.
D'autres tortures ont crissés sur tes sens. Elles n'étaient pas dus aux jeux violents de ses mains.
Il t'a donné sa souffrance, ses cris. Tu n'arrives pas à déterminer pour qui sont ces larmes qui coulent sur ton visage ravagé ; pour lui, ou pour toi. Pour ta peur- non, ta terreur... Ou bien pour les sanglots de la femme qui t'as sauvé ? Du monstre qui t'as fait souffrir ; qui t'as empêché de souffrir. De la terrible créature pétrie de violence dont les coups ont par résonance empathique broyer tes propres sens ? De cet ange sombre qui sous l'obédience de sa haine, a fait pleuvoir un courroux fatidique sur la chair souillée de vices de la créature qui gît en tas de chair flasque, rubescent de sa mort encore fraîche... Cette héroïne tragique qui a salit ses mains, cette femme de ténèbres pures, qui semblait si familière à un monde implacable duquel tu t'es si longtemps maintenu à distance, au moment de faire souffrir le monstre au corps humain.
Qui es-tu ? Qui es-tu de la femme, du cadavre, ou de l'homme qui tremble de cette violence ramenée du tréfonds de vos âmes moites d'une commotion encore par trop vivace ? Basile. Tu n'es pas fait pour évoluer en pareille univers ; on te demande de trimbarder sur des routes qu'en toute une vie de sourires et de douceur, tu t'es efforcé d'écarter de tes pas. Tu n'en es pas capable. C'est trop demander à ton être gorgé de candeur et de joies simples. C'est pincer trop fort les cordes sensibles qui tissent ton âme en scoubidous solaires ; faire hurler ton esprit sur un pizzicato glaçant qui t'empêche de bouger. Te paralyser sur l'autoroute de l'existence, et te demander d'attendre le prochain bus. Pour qu'il t'emporte. Loin. Sous ses roues.
Basile, il y a des montagnes de choses que tu ne comprends pas. Des citadelles de mots qui te font grimacer, des villes entières de pensées que tu rejettes, des marais fétides d’événements ignorés dont la bourbe n'atteint pas tes genoux. Il y a des orages entiers que tu as jeté loin de toi à grands moulinets de bras, des éclairs vibrants de bruit douloureux qui sont passés sans toucher tes oreilles que tu gardais éteintes ; pour que reste allumée cette flamme d'enfance qui brûle au fond de ton cœur, cette chose tendre et chaude comme un moelleux au chocolat qui s'est échoué au fond de ta poitrine, et que tu distribues avec de grands sourires, que tu tends aux gens pour que leurs joues rosissent d'un plaisir accouché avec l'aide de tes mains douces et tièdes. Basile, tu sais, ces montagnes de choses, ces bibus et ces grandeurs terribles qui forment, coalescents, une seule et même gargouille... Tu sais Basile, les vérités cruelles que tu as gardé à distance de ton vieil optimisme, qui semblait ne pas pouvoir s'user contre le monde, tu sais ces vérités qui frappent, qui tombent comme des pierres pour la lapidation, tu sais, tu sais, ces énormes brasiers froids qui rugissaient au bord du monde versicolore dans lequel tu enfermais ta vie qui roulait sur les planches, tu sais les méchancetés qui te fouettaient l'âme derrière ton sourire de pasquin, tes rires d’esbroufe contre l'ennuie et la tristesse ; tu sais Basile, la réalité.
Aujourd'hui, la garce t'as rattrapée. Et toi, sur ton idylle énorme, cet arbre arrosé de rêves, de gentillesses déversées en facondes... Tu deviens la fleur marcescente qui s'accroche par miracle. Déjà, le vent d'hiver a commencé à faner tes pétales. Déjà, tu as perdu un peu de ta fraîcheur. Et pourtant te voilà fiché dans cet univers plein de violence, contre toi une femme dont les mains ont pressées une gorge fragile jusqu'à y tuer les battements singuliers de la vie. L'étrange beauté de la pulsation répétée en cadence, tuée pour jamais entre les paumes de cet être fragile qui tremble sur ton torse.
Basile, il y a des montagnes de choses que tu ne comprends pas, c'est vrai. Mais tu sais que cette chaleur sur ta poitrine, ce petit bruit étouffé de respiration hachée, ces convulsions humides qui agitent l'animal tombé sur ton corps lourd, sont un appel à retrouver tout ce qui a fait de toi un arc-en-ciel humain. Il faudrait être plus que stupide pour ne pas comprendre ; c'est un truisme. Tu dois te montrer fort, à ta manière. Fort comme une de ces insignifiantes beautés qui faisaient ton bonheur, fort comme un flocon de neige qui lutte contre le soleil. Alors, nonobstant l'asthénie qui a saisit cette chair encore frémissante, tu serres le petit animal excédé de tristesse et de colère qui t'es tombé dessus ; comme un oiseau recueillie à sa chute du nid, comme un petit chat encore aveugle. Tu le serres, et dans cette étreinte, tes propres tremblement se noient. Tes longues mains tièdes lui caressent le dos, les cheveux, tes lèvres se mouvent seules pour décocher des mots qui n'ont pas de sens.


-Tout ira bien, cesse de pleurer, chut, écoute le silence paisible, regarde comme les ombres sont douces, pense à l'arc-en-ciel qui sourit dans le ciel, pense à la Lune qui subsiste parfois le matin en hiver, essaie de revoir la voie-lactée qui étend ses courbures nitescences, pense à l'aurore prochaine, chut, là, toutes les beautés du monde boivent tes larmes et en font un nectar que tu bois, que tu bois encore et encore jusqu'à devenir une braise au fond d'une cheminée, chut, du calme, suis la chaleur de mes mains, retraces en les chemins, j'ai dessiné sur ton dos comme un étang où flottent mes rêves...
Tu parles Basile, et on ne sait plus quand ton discours est né, on ne sait plus quand il va se flétrir. Tu racontes le monde au travers de tes yeux. Tu lui raconte le coquelicot rudéral qui plisse ses pourpres au vent, les belles lapalissades des lendemains dorés, la pluie qui chante sur les toits de Paris, transformée tout à coup en cœur philharmonique, tout en zinc rutilant, en acier qui brille fort, en bois polis, percé, en instruments qui scintillent sous la lumière grise de l'orage ronronnant, aux nuages qui semblent les bouffées de poils sombres d'un énorme chat noir... Tu parles Basile, tu parles. Ta voix est chaude, onctueuse, ton corps bourdonne.
Tu parles Basile, et tu t'oublis. Tu t'oublis en la femme au nom de vent hivernal, la femme qui porte dans sa voix des syllabes de bourrasques rasant les landes de glace et de neige... Là-bas, dans sa chaleur, dans ses ombres. Tu t'oublis.
Peut-être qu'en cet instant, tu ne peux tout simplement pas être toi même Basile. Sinon, tu tomberais, sinon tu te briserais. Alors, pour vous deux et les mots qui vivent sur ta langue, tu parles, et tu effaces ton existence qui vient de se noyer dans des bleus et de la poussière d'os. Tu n'essuies même pas le sang qui te poisse la barbe, le sang qui sourde de tes lèvres éclatées, le sang qui devrait encore courir dans tes veines. Tu restes debout, et tu caresses son dos, d'une main, l'autre serrée dans la sienne propre, collant vos doigts entremêlés entre vos cœurs qui battent, tout proches, scandant la vie qui se remet de tout ; scandant la vie, qui, peut-être, aura cette fois le dessus dans ce carnaval absurde dont s'abreuve dix millions de yeux avides qui rient de ta douceur, brocardant tes offrandes de mots et de gestes...




( *Parce-qu'en fait, c'était pour Liiiiiiz' :http://fr.lyrics-copy.com/julien-clerc/terre-de-france.htm
*http://www.youtube.com/v/93bjmLYvMkg )
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