[Autre/Court] Histoire d'un chien

29-06-2011 à 21:33:09
Je détestais ces espèces de grands couloirs roulants. Même sur mes quatre pattes, je suis obligé de rester allongé afin de ne pas tomber et de me faire pousser par tous ces humains. De plus, mon odorat me rapportait un trop grand nombre d’odeur diverses et variées, mais toutes les plus désagréables les unes que les autres, de l’odeur d’urine à celle du sang, et parfois même une odeur de mort. Et le pire était quand il s’arrêtait dans un grincement qui me faisait toujours gémir de souffrance. Pourtant, c’était ici que l’homme qui s’occupait de moi depuis toujours d’après mes souvenirs nous avait amenés. Je levais ma tête vers lui, pour avoir un peu de réconfort qui puisse me permettre de tenir, mais lui-même avait l’air absent… Autrefois joyeux et plein de vie, son regard s’était rempli de tristesse ces derniers jours. Nos promenades étaient passé d’un jeu plein de vie et de joie à, pour lui, une obligation. J’avais beau tenté de le réconforter, mais il m’avait seulement gratifié d’une caresse sur la tête entre mes oreilles et de quelques mots que j’étais incapable de comprendre.
En ce moment, il avait ce même regard triste. Un début de fourrure avait couvert le dessous de sa petite mâchoire, alors qu’avant il prenait grand soin de l’enlever après chaque période de sommeil. Je poussais un petit gémissement pour le faire réagir, il se contenta de repasser sa main sur mon dos et derrière mes oreilles avec un sourire triste.
Le couloir ralentit de nouveau et cria de nouveau avec son bruit que nul être vivant n’était capable de produire, et Il sembla enfin sortir de sa torpeur. Reprenant la corde qui le reliait au collier autour de mon cou, il se leva et me fit signe de le suivre, ce que je m’empressais de faire : tout était plus supportable que ces espèces de chariots de métal. Nous avions à peine passé la limite qu’une foule d’humains se retrouva autour de nous. Plusieurs fois, je Le perdis de vue, malgré qu’il ne lâcha pas la corde à un seul instant. Je dus retirer mes pattes à plusieurs reprise pour ne pas qu’elle se fasse marcher dessus : ces humains étaient lourds, et avec leur poids réparti sur une seule patte quand ils marchent comme ça, ça fait très mal si la notre leur sert de support malheureux.

Une autre frontière plus tard et un escalier, on se retrouva enfin sous la lumière du Soleil. L’odeur de cette partie de leur monde sans verdure n’était pas agréable, mais c’était mieux qu’en bas. J’eus à peine le temps de profiter de cette nouvelle fraîcheur que la corde tira mon cou, m’entraînant à Sa suite. Je le rejoignis en quelques bonds et resta à ses côtés. Ce n’était pas une sortie comme les autres : Il semblait chercher quelque chose. Après quelques centaines de pas, Il entra vers une grotte de métal comme tant d’autre, mais sitôt sa frontière franchie, je sus la différence : beaucoup d’odeurs de compagnons à quatre pattes étaient passées par là, et ce n’était pas le soigneur chez qui Il m’emmenait quand j’étais mal. Sans comprendre, je restais à ses côtés.
Il marcha vers une humaine avec qui il échangea un grand nombre de mots. Même sans comprendre, à leur regard je compris que je devais être un des sujets de leurs paroles. Puis elle l’entraîna, et moi avec, dans ce que je croyais être les profondeurs de la grotte. Pourtant, un courant d’air et les odeurs de leur monde m’indiqua rapidement qu’il s’agissait en fait d’une autre entrée/sortie. Mais à ces odeurs nauséabondes, je sentis aussi une odeur d’arbre et d’herbe mouillée, ce que me confirma mes yeux quand elle ouvrit la frontière sur un espace sous le ciel de petite taille entre leurs falaises, mais un espace remplis de vraie terre, de vraie herbe et des arbres. Je regardais silencieusement cette zone, puis je L’observais. Il eut un bref mouvement de tête comme quand il semblait être d’accord avec quelqu’un, puis il rentra, moi derrière lui.
Je me demandais encore pourquoi nous étions venus ici, quand je vis la grande boite avec des barreaux par terre. C’est alors que je compris, et m’arrêta brusquement : Il allait me laisser là ! Il allait me donner à ces humains que je ne connais pas, comme ces petits ronds de métal qui sonnaient dans sa poche. Voyant que j’étais arrêté, il se retourna et se mit à ma hauteur et me dit quelques mots :
« Ce n’est pas pour très longtemps. Je vais revenir. Je veux juste que tu sois bien pendant les quelques jours où je ne serais pas là. »
‘Je vais revenir’. Ces mots là, je les comprenais. Pas le reste. Mais peu importe : en fait, il ne me donnait pas. Ces humains n’était là que pour me surveiller. C’est comme quand il part en disant ces mots et qu’un étranger vient me donner à manger et me faire sortir, sauf que là, c’était moi qui allais chez eux. Rassuré, je lui passa un petit coup de langue sur son visage pour lui dire que j’avais compris. Il me prit alors dans ces bras, me tapotant doucement, avant de me relâcher et d’enlever la corde autour de mon collier. La queue basse, je rentrais alors dans la boîte que l’humaine referma derrière moi. Je me retournais et le regarda une dernière fois. Il avait toujours ce sourire triste, mais sa position montrait qu’il avait enfin commencé à re-vivre. Si je devais passer par là pour pouvoir à nouveau courir joyeusement avec lui, je le ferais.



Quelques jours plus tard, alors que ma vie était devenue immuable, j’entendis quelqu’un que je ne connaissais pas rentrer dans la pièce, alors que l’humaine venait de me donner à manger après ma sortie. Je ne m’intéressais pas à leurs paroles, jusqu’à ce que j’entende le mot de ‘Gautier’. C’était le mot auquel Il réagissait, j’avais fini par comprendre que c’était avec ce mot là que les humains le désignaient. Je me redressais, et tenta de comprendre quelque chose à ce que ces humaines devant moi se disaient.
« Que lui est-il arrivé ?
-On l’a retrouvé dans sa maison ce matin…
-Mort ?
-Oui… Un suicide apparemment… »

Je n’écoutais plus la suite. ‘Mort’, Il l’avait déjà prononcé ce mot quand il parlait d’humains qu’on allait voir dans une grosse boite en bois qu’on enterrait sous terre. Et maintenant, c’était lui… Je compris qu’il ne reviendrait jamais, qu’il ne pourrait jamais revenir. La tristesse envahit mon corps, et sous leurs yeux embués de larme des humaines, je laissais couler les miennes en poussant un long hurlement pour tenter, en vain, de Le ramener.
L'initialement anonyme.

Les lycanthropes renferment bien des secrets. Êtes-vous sur de vouloir les connaître?
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