[Science-Fiction] Les Voies du Destin

29-06-2011 à 01:13:01
Attentat
Du haut de sa petite colline, Josh O'Neil observait l'étendue de sable et de poussière balayée par un vent impitoyable qui soulevait sous son regard des nuages tourmentés. Les lunes jumelles de la planète Stilai éclairaient la longue nuit qui régnait ici. Le rebelle apercevait en contrebas, à travers la brume, l'entrepôt d'armes des Services de Sécurité et de l'Ordre du Royaume, appelée plus couramment le SSOR, initiales qui signifiaient plutôt pour Josh et ses compagnons de l'Ordre Libre, Surveillance de la Servilité et Organisation de la Répression. Il porta la main à sa taille, et attrapa fermement la poignée de son pulseur de poing, avant d'en ôter la sécurité. Dans sa sacoche, la bombe était bien en place, attendant qu'on appuie sur l'unique bouton pour commencer un compte à rebours, au terme duquel une rafale de laser aux trajectoires aléatoires accompagneraient un déflagration d'une quarantaine de mètres de diamètre. Dernier coup d'œil à travers les jumelles pour vérifier son itinéraire et sa cible. Sa moto à impulsion gravitique était bien cachée, là où il pourrait la retrouver pour filer en vitesse une fois son méfait accompli. Son gilet pare-balles antilaser était bien fixé. Heureusement qu'il avait été autorisé à s'équiper à volonté pour cette mission. Arme à la main, il entreprit de dévaler cette colline.

Le vent était encore plus violent que d'ordinaire, et parcourait la plaine dans un hurlement déchirant.
Mais au moins, il se faisait ainsi le complice de Josh. Le sable dur et sec fouettait la visière de son casque, et gênait sa vue sous la blême clarté du clair de Lunes. Mais le rebelle avait eu tout le temps d'étudier le terrain. Il pouvait maintenant le traverser sans y voir plus que quelques repères. Il faillit penser à tous ses amis, toute cette vie qu'il risquait de laisser derrière lui à la moindre erreur, mais sa concentration lui permit miraculeusement d'échapper à cela. Ce n'était pas le moment d'avoir des émotions, il fallait remplir l'objectif. Seulement remplir l'objectif. Rien d'autre.

Déterminé, il parvint jusqu'à l'entrepôt. Enfin, il lui restait encore une vingtaine de mètres à parcourir, mais cette distance à découvert était surveillée par trois de ces abrutis du SSOR. Et encore, c'était des pauvres tâches, le plus bas grade de ce service, grade dont le terroriste avait oublié le nom officiel. Mais pour résumer, ils étaient tellement stupides qu'ils ne se rendaient pas compte qu'on se servait d'eux et pensaient sincèrement qu'ils jouaient un rôle important pour la sécurité des citoyens. C'était attristant de devoir tuer des gens pleins de bonnes intentions comme eux, mais s'ils avaient été plus intelligents, ils aurait combattu pour le bien des citoyens aux côtés d'un groupe rebelle. Il n'y avait donc aucune hésitation à avoir au moment de poser la bombe et d'appuyer sur le bouton. Un petit geste pour un homme, une grande destruction pour un entrepôt. Maintenant ! La détermination permit aux jambes de Josh de dévorer la distance qui le séparait de sa cible et de se positionner précisément à l'endroit où il l'avait prévu, après l'observation à l'aide des jumelles. Ici, personne ne le verrait. Dans l'ombre d'un poteau d'acier et d'un mur de béton, il ouvrit lentement sa sacoche, et posa l'engin destructeur près d'une caisse d'obus pour canons à impulsion laseromagnétique (CIL). Si ce truc explosait ici, il ne resterait rien, plus aucun souvenir de la construction, juste un profond cratère de sable et de poussière de cent cinquante mètres de rayon. Pour le moment, tout se passait bien. Mais c'était la première fois qu'il posait une bombe. Et il n'avait pas vraiment envie que ça soit la dernière... Sous son casque et ses vêtements couleur sable, Josh nageait dans sa sueur. Bon sang, mais ces idiots de gardes devaient être sourds, pour ne pas entendre les battements de son cœur !

Il fit le choix d'appuyer sur le bouton avant que sa détermination ne le quitte. Il lui restait une minute pour atteindre sa moto-grav sans se faire abattre par une fléchette de pulseur d'assaut. Il s'élança sans chercher à savoir si l'une de ces armes était déjà pointée sur lui, mais après avoir parcouru moins d'une centaine de mètres, des cris d'alarme et des ordres lui sommant de s'arrêter et de s'allonger à terre retentirent à travers le vent à la fureur grandissante. Toutefois, même ce vent ne pouvait pas stopper les tirs qui fusaient vers lui, et une fléchette laser lui entailla l'épaule droite tandis qu'une autre manqua sa tête et siffla à quelques centimètres de son oreille. D'une roulade, il échappa à d'autres tirs, mais en bout de course, alors qu'il allait pouvoir se mettre à l'abri derrière le rocher où son véhicule l'attendait, la douleur lacéra violemment son mollet droit. L'adrénaline lui permit d'arracher à main nues le projectile fiché dedans avant qu'il ne cause plus de dégâts et se réflexe lui sauva peut-être la vie : une seule fléchette pouvait tuer un homme en déversant dans son sang l'énergie qu'elle contenait. Les pires restaient encore les fléchettes nucléaires, mais celle-ci semblait être au laser, et la brûlure autour de sa blessure confirmait cette estimation. Josh parvint à démarrer sa moto-grav au moment où l'explosion domina le vent et retentit dans le désert calme et imperturbable, déchirement dans la nuit. Les seules témoins de son acte, normalement, devraient être les deux Lunes jumelles de la planète Stilai, qui avaient accompagnaient sa fuite de leurs rayons pâles et reposants.

Rencontre inopinée au camp
Il finit par arriver au camp caché de l'Ordre Libre, dans lequel il fut bien accueilli par ces confrères.
- La vache, t'as une sale plaie à la jambe... C'est une fléchette ?
- Oui, grommela-t-il.
Flat Hardik était un tireur d'exception de l'Ordre, très expérimenté, mais sa plus grande qualité était incontestablement qu'il faisait un très bon ami. La quarantaine, des cheveux courts bruns, un visage aux traits droits et une barbe taillée en un bouc très court au menton, il était assez grand, et fin. Il s'inquiétait facilement pour les autres, et n'avait probablement pas cessé de se morfondre pour Josh pendant son absence.
- Comment ça s'est passé ?
- Ben, comme on peut espérer que se passe ce genre d'attentat... répondit le héros.
- Tu ne me dis pas si ça a sauté ou non.
- Il n'en reste plus rien. J'ai posé la bombe contre une caisse d'obus à CIL, l'explosion a fait trembler la planète.
- Parfait ! Mission accomplie et tu es sain et sauf. Enfin, presque... Tu peux marcher ? s'enquit le vétéran.
- Oui, mais je sais surtout boiter...
- On va te soutenir jusqu'à l'infirmerie, il te remettront sur pieds très vite.
Josh le remercia et claudiqua tant bien que mal jusque-là. Flat retourna à son poste de garde en lui garantissant qu'il ferait le détour pour signaler sa réussite, et le jeune rebelle lui fit confiance. Il n'était pas le seul blessé, mais, rentrant d'une mission importante et dangereuse, il eut droit au privilège d'une attention renforcée. La médecine avait évolué en même temps que la technologie de l'armement, et dans trois ou quatre jours, il pourrait retourner gambader l'arme au poing dans les plaines venteuses du Désert Hurlant de Stilai.

L'ancien Royaume d'Ethna, rebaptisé à présent Royaume de Vizir, du nom de son nouveau roi – qui se faisait surnommer “sa Majesté Superbe et Absolue”, ou encore “sa Majesté la Couronne Divine” - était en pleine guerre civile. Ce gros lard de Vizir était parvenu au pouvoir à la suite d'un coup d'Etat, trois ans T plus tôt, et il n'avait rien fait d'autre que des réformes du système visant à améliorer sa propre vie ou les intérêts de ses amis, ou visant à supprimer le droit de contestation du peuple, jusque dans ses pensées les plus profondes. On n'avait même plus le droit de penser par soi-même, bref, une dictature classique, particulièrement violente, agrémentée d'une foule d'opportunistes. La rébellion n'avait mis qu'un an à apparaître, et ne supportant plus de ne pas être maître de lui-même, Josh l'avait ralliée au bout de quelques semaines à peine. Le camp principal de la rébellion, la “capitale”, était basée sur Yort, la planète du Royaume multi-systèmes de Vizir la moins touchée par les autorités du SSOR, car la plus isolée. Plusieurs camps secondaires occupaient Silai, et même la planète mère du Royaume, Ethna. Bien entendu, tous ces camps changeaient régulièrement de position, car ils ne devaient surtout pas être découverts par l'Etat.

Josh devait tout à l'Ordre Libre, alliance de plusieurs groupes rebelles, sans qui il n'aurait jamais pu combattre pour son propre Destin. De toute façon, il n'avait plus que cela à défendre : sa famille avait été tuée lors du coup d'Etat de Vizir, car tous ses membres avait d'une façon ou d'une autre un lien avec l'ancien souverain : son père était un cuisinier du Roi, sa mère la gouvernante de l'un des palais, ses deux frères étaient faisaient partie de la Garde Royale... Il n'avait plus que leur mémoire et la fierté des Nail à protéger, en plus de sa propre liberté.

L'arrivée d'un groupe assez déroutant le tira de ses pensées. Ils étaient quatre. Deux, sur les côtés, dans un uniforme noir et or, armés de deux pulseurs de poing, l'un à la cuisse et l'autre à la ceinture, ainsi que d'un pulseur d'assaut dans le dos, arboraient à la ceinture un authentique et tout aussi anachronique sabre, plus un symbole solennel qu'une arme. Ils semblaient être les gardes du corps des deux personnages au milieu, bien plus intéressants. Une femme et un homme. Tous deux très bien habillés, des vêtements modernes, d'un blanc immaculé et rayonnant pour la femme, sang et or pour l'homme. Ils avaient une allure fière et noble, mais pas arrogante, et leur attitude autant que leur expression incitait à la confiance. Mais Josh se méfiait de tout. Surtout quand des hauts personnages comme eux entraient dans l'infirmerie de fortune d'un camp secret rebelle de l'Ordre Libre... Et pour couronner le tout, à la grande surprise du jeune terroriste, ils se dirigèrent vers lui. Que pouvaient bien lui vouloir ces gens ? S'ils avaient pu entrer ici, c'est forcément qu'ils n'étaient pas de l'Etat, mais alors ? Il prit quand même son pulseur de poing sur le sol, à côté de son lit de camp, et s'assit, adossé au mur. La femme aux longs cheveux blonds prit la parole d'une voix claire et fluide, le genre de voix qu'on a envie d'écouter jusqu'à s'en endormir et rêver... Mais Josh releva à peine ce détail, et il écouta tout en surveillant le moindre mouvement qui pourrait lui paraître suspect.
- M. Josh Nail ?
Il ne répondit pas, et planta un regard froid et sans expression dans celui yeux doux et bienveillant de son interlocutrice.
- Je vois, c'est bien vous donc. Je vous en prie, lâchez cette arme, si nous sommes là, ce n'est pas contre vous ni l'Ordre Libre.
Donc ils connaissaient même le nom de cette organisation... Mais cela ne prouvait pas un quelconque statut d'alliés. Cependant, en observant le sabre d'un garde de plus près, Josh reconnu gravé sur le pommeau un aigle portant un bouclier dans ses serres et un couteau dans son bec. Le symbole de la Garde Royale de Kreesh, un royaume florissant avec lequel ce porc impérialiste égocentrique sur le trône entretenait des relations de plus en plus mauvaises. Ceci ne fit que soulever plus d'interrogations dans l'esprit du jeune homme, qui se décida finalement à parler.
- Vous êtes de Kreesh ? demanda-t-il sur un ton dur et distant.
- Oui, nous sommes de Kreesh, répondit l'homme brun et large d'une voix grave. Voici Altéa Harrington, et moi je suis Daniel Monblanc. Nous dirigeons un service secret de Kreesh, qui requiert votre participation. Ce n'est pas seulement dans l'intérêt de Kreesh : c'est dans l'intérêt de tout l'univers connu dans lequel des hommes se sont installés après leur départ de la vieille Terre.
- Et en quoi ça me demande moi, en particulier ? Je dois sauver la galaxie ?? rétorqua Josh d'une voix pleine d'ironie.
- Vous êtes toujours méfiant ?
La voix douce de la femme semblait vraiment lui demander d'abaisser ses barrières. Mais il était un rebelle, il ne pouvait faire confiance à personne.
- Qu'est-ce qui vous dit que je suis méfiant ?
- Votre regard en dit encore plus que vos sarcasmes. Vous rêveriez de pouvoir nous accorder votre confiance.
- Alors prouvez-moi que je peux.
- Voilà qui est bien dit, jeune homme, remarqua Monblanc. Je ne vais pas y aller par quatre chemins : nous avons besoin de vous en particulier, pour des raisons particulières, mais nous allons d'abord avoir besoin de tous les rebelles ici présents. Il est capital pour tout le monde que tous les états soient unis pour contrer la menace à venir. Et nous aurons donc besoin de l'Ordre Libre pour faire tomber cet abruti de Vizir du trône d'Ethna, car il n'est favorable à aucune alliance. C'est la première étape, mais elle est primordiale. Bien sûr, on ne vous demande pas un service gratuit : nous vous fournirons des équipements de première qualité pour vous soutenir.
- Je pense pouvoir vous remercier de votre aide au nom de tout l'Ordre, mais, en quoi suis-je si spécial ? Pourquoi me choisir moi ? Quelle est cette menace ? Que...
Il fut coupé par l'agréable Altéa Harrington :
- Il y a certainement des tas de questions qui vous viennent à l'esprit, mais nous ne pourrons en parler qu'en privé, et une fois que vous aurez réussit à faire tomber le souverain actuel.
Josh prit conscience que toutes les paires d'yeux présentes dans la salle fixaient avec attention les étrangers et lui-même depuis le début de leur conversation. Enfin, conversation... Josh n'avait pas prononcé une seule phrase qui ait réellement une importance, à part toutes ces questions immédiatement éludées.
- Dites-moi au moins pourquoi moi !
Ils le regardèrent d'un air amusé, comme on regarde un enfant, et ne répondirent pas. Finalement, l'homme prit la parole :
- Je peux simplement vous dire qu'un grand destin vous attend peut-être. Nous vous recontacterons dans ce camp après la réussite de votre rébellion. Bonne chance !
Ils tournèrent le dos et partirent, avec un sourire de la dénommée Harrington. Il leur lança :
- Alors sachez au moins que ce n'est pas un destin qui m'attend, mais que c'est moi qui vais chercher mon destin, et que j'en suis le seul maître !
Le groupe inattendu sortit, avec un signe de main de la part de Monblanc.
"- Crois-tu en le Destin, Néo ?
- Non. Je ne supporte pas l'idée que quelqu'un dirige ma vie à ma place.
- Précisément. Et je suis fait... pour te comprendre.
" - Matrix.
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08-08-2011 à 17:29:57
J'aime beaucoup.

Le ridicule ne tue pas.
Ce qui ne nous tue pas nous rends plus fort.

Donc ... Le ridicule rend plus fort ? -_-'